Les outils numériques pour repenser ses pratiques pédagogiques

En favorisant notamment la collaboration ou encore l’individualisation des contenus, les outils numériques permettent d’enrichir les modalités d’enseignement et de faire évoluer la posture enseignante. Rencontre réunissant Marie-Anne Dupuis, professeure d’économie-gestion, Charlie Rollo, professeur d’anglais et membre du collectif Team Ludens, et Didier Roy, chercheur en technologies numériques pour l’éducation et en enseignement des sciences du numérique.

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EP102

Les outils numériques pour repenser ses pratiques pédagogiques

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"Les outils numériques pour repenser ses pratiques pédagogiques" "Avec Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion, Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens, Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation" "Table ronde audio" Mélinée Chanard.

-Développer le numérique à l'école constitue un enjeu pour construire la citoyenneté numérique, favoriser une école inclusive, assurer la continuité pédagogique et administrative pour une école plus résiliente et pour la réussite de chacun.

Chaque professeur doit donc être formé aux compétences et à la culture numériques afin de s'inscrire dans une démarche de développement professionnel et de pouvoir accompagner ses élèves.

Un nouveau référentiel inspiré du DigCompEdu européen a été stabilisé en décembre 2021.

Ce cadre de référence des compétences numériques pour l'éducation, CRCN-E ou CRCN Édu, donne lieu à un dispositif de reconnaissance de ces compétences destiné à rendre compte d'une maîtrise progressive dans la carrière de chaque enseignant.

Il fait l'objet d'une phase pilote qui a débuté en janvier 2022.

En partenariat avec le groupement d'intérêt public Pix, avec le soutien du ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse et financé dans le cadre du plan France Relance, Réseau Canopé propose une série de webinaires pour accompagner les enseignants dans ce dispositif.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce webinaire.

Nous allons aujourd'hui nous intéresser au renouvellement des pratiques pédagogiques que peut permettre l'introduction d'outils numériques au sein de la classe.

Ces outils n'ont pas d'efficacité intrinsèque, ils ne rendent ni les enseignants meilleurs pédagogues ni les élèves plus performants.

En revanche, ils facilitent la mise en place de pédagogies adaptées aux besoins des élèves.

Cet échange vous permettra dans un premier temps de comprendre l'intérêt de repenser vos pratiques pédagogiques aujourd'hui et d'identifier les impacts du numérique sur votre pédagogie.

Vous découvrirez des pratiques de classe concrètes en lien avec l'usage du numérique, et pour terminer, nous définirons ensemble les conditions nécessaires à une utilisation du numérique efficace en classe.

Vous pourrez également retrouver ce webinaire en replay prochainement sur le site de Réseau Canopé et sur la plateforme Pix.

Nous accueillons trois invités.

Marie-Anne Dupuis, vous êtes professeure d'économie-gestion au lycée des Métiers Jean Caillaud, à l'académie de Poitiers.

Marie-Anne Dupuis, puis Miléna Eskenazi.

-Oui, bonjour.

-Bonjour.

Charlie Rollo, vous êtes professeur d'anglais au collège Jean-Baptiste de la Quintinye et membre du collectif Team Ludens.

Charlie Rollo, puis Miléna Eskenazi.

-Bonjour.

-Bonjour.

Didier Roy, anciennement professeur de mathématiques dans le secondaire, chercheur à Inria et au LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

Vous vous intéressez aux apports de l'intelligence artificielle et de la robotique dans le domaine de l'éducation.

Didier Roy, puis Miléna Eskenazi.

-Bonjour.

-Bonjour.

Et je suis Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

Pour commencer, beaucoup d'enseignants aimeraient se lancer dans le numérique, aimeraient intégrer le numérique dans leurs pratiques, mais hésitent.

Pour les encourager à amorcer cette transition, pouvez-vous nous expliquer pourquoi repenser sa pédagogie, et pourquoi avec le numérique ?

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Je me suis posé les mêmes questions.

J'enseigne depuis une quinzaine d'années l'économie-gestion, et il y a dix ans, je me suis posé la question de savoir comment je pouvais faire pour que mes élèves aient plus d'envie, soient plus motivés et n'arrivent pas en traînant la patte pour venir en cours.

Donc, j'ai fait le MOOC sur la classe inversée avec beaucoup de professeurs très inspirants qui utilisaient beaucoup le numérique.

Je me suis dit : "Pourquoi ne pas se lancer en utilisant des murs collaboratifs, en créant des capsules pédagogiques, et surtout, en rendant, un terme que j'aime beaucoup, la pédagogie active ?"

La définition, c'est de rendre l'élève plus acteur de ce qu'il a à faire, et, en fait, de le mettre au centre de ce qu'il va pouvoir faire dans son année, donc en lui délivrant des ressources, bien sûr, c'est pour ça que j'ai mis en place des petites choses, et c'est lui qui décidait, soit seul, soit en groupe, de ce qu'il pouvait faire et comment il pouvait apprendre en lui proposant des missions.

C'est-à-dire qu'on apprend davantage en faisant plutôt que d'avoir, je n'aime pas trop le mot, mais une pédagogie traditionnelle du style théorie et pratique après.

Donc, là, c'était un petit peu l'inverse.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Je rejoins totalement Marie-Anne.

C'est vrai que le métier d'enseignant est un métier qui est mouvant, on se questionne tout le temps, il y a cette idée de tout le temps être en veille, de rechercher.

On apprend beaucoup de nos collègues.

On apprend aussi des sciences de l'apprentissage, on est dans un mouvement perpétuel d'apprentissage nous-mêmes.

On est tout le temps en formation.

Même au-delà de repenser, je dirais qu'on pense tout le temps notre pédagogie avant de la repenser.

Quand j'ai commencé, c'est arrivé très rapidement.

J'avais envie d'adapter et de différencier pour inclure tous les élèves.

Et moi aussi, ça m'a permis de me mettre dans une posture où j'avais envie de bouger mon statut d'enseignant, je n'avais pas forcément envie d'être ce transmetteur de savoir, comme tu disais.

En ce sens, moi, j'aime bien que mes élèves puissent se lever, parfois, ils sont en îlots où ils bougent tout le temps.

Bien sûr, parfois, il y a des phases plutôt descendantes, mais j'aime bien qu'il y ait un peu de tout.

Voilà pourquoi j'ai voulu mettre ça en place.

Il y a une idée que j'aime beaucoup, ça rejoint les pédagogies actives, c'est la vivification.

J'aime aussi intégrer le jeu, c'est un des leviers que j'utilise, je n'en fais pas tout le temps, mais ça me permet de faire développer des compétences chez mes élèves, des connaissances et des compétences interdisciplinaires.

Et je dirais que le numérique n'est pas forcément la chose tout en haut de la pyramide, c'est quelque chose qui m'accompagne.

On va dire que c'est un outil, un levier qui me permet vraiment de différencier, d'accompagner d'une manière encore différente.

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-La mission d'enseigner, c'est vrai qu'elle est compliquée, puisque l'objectif est de faire réussir tous les élèves.

Tout ce qui peut y contribuer est quelque chose d'intéressant.

En particulier, repenser sa pratique permet d'avoir des éclairages, de nouveaux éclairages sur ce qu'on fait.

Du coup, ça permet aussi d'explorer d'autres pistes, d'ouvrir d'autres possibilités.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-D'accord.

Didier Roy, la question de la différenciation pédagogique a été évoquée.

Est-ce que vous pouvez définir cette notion et nous expliquer en quoi le numérique peut aider à différencier ?

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Alors, la différenciation pédagogique, en quelques mots, consiste à prendre en compte les spécificités de chaque élève pour bâtir son enseignement et pouvoir proposer des apprentissages qui leur soient le plus profitables.

On trouve dans la différenciation plusieurs aspects qu'on peut mobiliser pour y parvenir.

On a par exemple la diversification, l'individualisation et la personnalisation.

La diversification consiste à varier son enseignement, varier les modalités d'organisation de la classe, changer des dispositifs didactiques.

Ensuite, l'individualisation consiste à calibrer sur mesure des contenus pour chaque élève et à fournir à chacun de ces élèves les indications nécessaires pour qu'ils puissent travailler seuls.

La difficulté de cette approche, c'est qu'elle bénéficie surtout aux meilleurs élèves, qui sont les plus outillés pour pouvoir se débrouiller tout seuls, travailler de façon autonome et en confiance.

La personnalisation, quant à elle, reprend l'aspect positif de l'individualisation en proposant des contenus qui sont spécifiques, individualisés, mais elle ajoute en plus une dimension sociale à travers la coopération, l'entraide, le débat, les échanges, ce qui évite le travers de l'isolement.

Pour les apports du numérique, moi, je les vois à deux niveaux.

Au niveau de l'enseignant, ça permet de disposer d'outils pour faciliter cette différenciation pédagogique et également pouvoir créer des activités plus intéressantes, plus nouvelles, etc.

Du point de vue de l'élève, les outils numériques permettent aussi d'accroître la motivation, de stimuler la curiosité.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Alors, justement, vous avez aussi participé à des expérimentations concernant l'intelligence artificielle pour la mettre au service de la différenciation.

Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur ces expérimentations ?

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Oui, en effet, dans le cadre du P2IA, le partenariat d'innovation et d'intelligence artificielle qui est porté par le ministère de l'Éducation, des dispositifs numériques d'accompagnement scolaire ont été créés dans le cadre de projets, projets mobilisant des labos de recherche, des éditeurs scolaires, et puis aussi des entreprises EdTech.

Des expérimentations ont lieu dans des académies partenaires, dans des classes, avec des académies partenaires.

Pour aller un petit peu plus dans le détail, je vais citer deux projets que je connais bien, c'est Adaptiv'Math, qui est un projet pour les maths en primaire, et Adaptiv'Langue, qui est un projet pour le français au lycée, qui mobilisent deux algorithmes d'intelligence artificielle qui fonctionnent différemment, mais de façon combinée, de manière à proposer la meilleure personnalisation qui soit.

Donc, un premier algorithme d'intelligence artificielle qui suit en temps réel tout ce que fait l'élève, de manière à pouvoir lui proposer tout au long les exercices qui vont l'aider le plus à progresser.

Le deuxième algorithme d'intelligence artificielle, lui, va proposer des regroupements d'élèves autour de critères qu'il aura définis.

Par exemple, ça va être des natures d'erreurs ou alors la réussite à certains exercices.

Il va avoir des regroupements à faire et il va les proposer à l'enseignant.

Alors, comment l'enseignant peut utiliser ça ?

L'enseignant peut créer des temps de travail autonome pendant lesquels les contenus qui sont proposés s'adaptent automatiquement à chaque élève avec le processus que je viens d'expliquer, et puis, pendant ce temps-là, l'enseignant peut passer voir chacun, échanger avec lui, suivre ce qu'il fait, ou alors il peut aussi profiter de ce temps-là pour accompagner des élèves qui peuvent avoir des besoins particuliers.

Je voulais ajouter un point important, car ça revient assez souvent, l'objectif ici n'est pas de remplacer l'enseignant, bien entendu, c'est vraiment un outil destiné à l'aider à faire de la différenciation, pas à le remplacer.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-C'est bien de le préciser pour rassurer nos collègues, merci.

On voit à quel point le numérique a un impact sur notre pédagogie, et on va expliquer comment mettre en œuvre ce changement, notamment grâce au modèle SAMR, que vous connaissez peut-être.

Le voici en images.

Narratrice.

-Pour explorer la mer, il existe de nombreuses approches permettant d'atteindre différents buts.

Pour explorer le numérique en classe, c'est la même chose.

Selon les objectifs pédagogiques, l'enseignant doit questionner les outils et les pratiques numériques qu'il peut intégrer.

Le modèle SAMR peut aider les enseignants dans cette réflexion.

Mais qu'est-ce que le modèle SAMR ?

Comment questionne-t-il l'intégration du numérique dans la pédagogie ?

C'est ce que nous allons voir dans cette vidéo.

Le modèle SAMR a été conçu par le chercheur américain Ruben Puentedura, en 2006, avec l'idée que le numérique n'est pas une fin en soi, mais un moyen à adapter aux objectifs pédagogiques pour en tirer le meilleur bénéfice.

Le modèle décrit quatre degrés d'utilisation des outils numériques : substitution, amélioration, modification et redéfinition.

Imaginons que vous souhaitiez écrire des contes avec vos élèves.

Plusieurs choix s'offrent à vous avec l'utilisation du numérique.

On parle de substitution si l'outil numérique est simplement substitué à l'outil traditionnel sans apporter de fonctionnalités supplémentaires.

C'est le cas si l'élève utilise un traitement de texte avec seulement ses fonctionnalités d'écriture.

Ce changement de support permet aux élèves de se familiariser avec le numérique, mais son usage reste basique.

On parle d'augmentation si les élèves utilisent par exemple le correcteur orthographique ou les fonctions de mise en forme.

Le numérique apporte alors des fonctionnalités qui n'existaient pas avec l'outil traditionnel.

L'augmentation et la substitution sont des degrés d'amélioration.

L'outil numérique facilite la compréhension ou la mise en application, mais il ne modifie pas les tâches des élèves.

Les deux degrés suivants sont dits de transformation.

De nouvelles manières de travailler entrent en jeu et renforcent l'impact pédagogique.

On parle de modification si l'outil numérique permet la mise en place de pratiques très difficiles sans son aide.

Pour écrire leur conte, les élèves peuvent par exemple utiliser un document partagé en ligne.

Chacun peut y accéder quand il le souhaite, voir les apports des autres et interagir avec eux.

Vous pouvez également l'annoter et mettre des commentaires.

L'outil fait partie intégrante du processus d'exécution de la tâche, et les interactions entre enseignant et élèves sont modifiées.

Le dernier degré est celui de la redéfinition.

Par exemple, c'est le cas où l'enseignant propose aux élèves de recueillir leurs contes dans un livre numérique.

Les élèves peuvent enrichir leur travail avec des images, des bruitages et des dialogues enregistrés.

L'utilisation du numérique redéfinit alors le projet final.

L'élève devient producteur de savoirs et de contenus.

Il met en œuvre des compétences créatives, collaboratives et de communication.

Dans le cas de la redéfinition, l'impact pédagogique est très fort.

Avec le numérique, on ne fait pas que substituer des usages.

On les augmente, on les modifie, on les redéfinit.

De nombreux logiciels, sites et applications permettent d'enrichir les activités pédagogiques.

Il incombe aux enseignants de questionner la pertinence de chacun d'eux.

Quels outils, pour quelle finalité, et le modèle SAMR aide à garder le cap.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Charlie Rollo, est-ce que vous voulez réagir par rapport à ce qui a été dit dans la vidéo ?

Comment intégrez-vous ce modèle SAMR dans votre pratique ?

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Le modèle SAMR est très intéressant, ça permet, je vais faire des redites par rapport à la vidéo, mais ça nous permet de nous positionner par rapport à notre intégration du numérique.

Ça nous permet également de questionner vraiment la pertinence de cet outil avec les élèves, mais pas qu'avec les élèves, ça peut aussi concerner ceux qui sont dans la formation, donc avec n'importe quel type d'apprenants.

Et ça permet de se dire : "Est-ce que l'outil que j'utilise a vraiment une pertinence ou est-ce que je n'en ai pas besoin ?

Peut-être qu'il n'est pas adapté pour la situation, ou est-ce que je peux même aller plus loin, changer de niveau et aller au-delà de cette utilisation-là ?"

Je peux donner un exemple de pratique en classe.

Je suis professeur principal de quatrième, et je porte un projet de podcast sur l'orientation, avec mes élèves.

En fait, on se rend compte qu'avec un seul projet, les élèves vont aller sur différents paliers.

À chaque fois qu'on utilise le numérique, on n'est pas obligé de se positionner à côté de son modèle SAMR pour voir où on se trouve, mais en tout cas, ça permet de se dire : "Mes élèves vont utiliser un document texte pour compléter une fiche métier, ensuite, ils vont utiliser un document collaboratif synchrone."

C'est un pad collaboratif où chaque élève a sa couleur et ils peuvent voir les différentes questions posées par les élèves.

Ils peuvent tous participer dessus.

Il y a également un tchat et un historique qui permet de voir ce qui a été écrit, si des choses ont été effacées.

Donc, là, on a vraiment une redéfinition des temps.

Les élèves, comme il est dit dans la vidéo, il y a vraiment une construction par les élèves et eux vont aller sélectionner les questions.

Ensuite, ils vont aller enregistrer le professionnel.

Ensuite, on passe en studio de production de podcast.

Sans le numérique, on ne pourrait pas faire ça.

Donc, il y a vraiment une modification aussi, ici.

Et ensuite, ils passent à l'utilisation d'Audacity pour élaguer le fichier audio et pour ajouter des musiques libres de droits.

Ce que je trouve hyper intéressant, c'est qu'en prenant le recul, en se disant : "Voilà ce que j'ai fait dans ce projet", dans ce projet, on sera passés par différentes étapes du SAMR, et ensuite, on se rend compte aussi, et c'est dit dans la vidéo, qu'on passe vraiment d'un élève consommateur de numérique, c'est-à-dire passif devant l'écran, à une position vraiment active.

On parlait de pédagogie active, mais c'est ça.

On crée ensemble, il y a une vraie production quasiment de type professionnel, et ça, c'est hyper riche et intéressant à créer avec les élèves, et eux-mêmes sont contents.

Ce sont des choses qui sont à valoriser par la suite.

Voilà pour mon expérience de terrain.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Très bien.

Alors, il y a une difficulté rencontrée par beaucoup d'enseignants, c'est que nous sommes confrontés à une multitude d'outils, une multitude d'options, et finalement, il est difficile parfois de se repérer.

Comment faites-vous pour mobiliser les bons outils et rester à la page ?

Marie-Anne, comment procédez-vous ?

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Je suis d'accord avec vous, il y a énormément d'outils.

En plus, en faisant un peu de veille, en discutant avec les collègues, on en trouve toujours un qui nous paraît plus intéressant.

Donc, il faut faire attention à ça et il ne faut pas utiliser 150 outils, sinon on se noie et les élèves aussi.

Moi, ce que je conseille, c'est ce que je fais avec mes élèves, en début d'année, ils ont une liste d'outils.

Je varie, j'essaie d'adapter les outils quand c'est des jeunes entrants qui arrivent en seconde, ou si c'est des jeunes qui ont déjà un peu d'expérience en terminale, je fais très attention à ce que mes outils soient bien adaptés à eux.

Effectivement, il y a un outil que j'aime beaucoup, c'est Genially, parce que ça m'aide à concevoir des parcours sur lesquels ils se repèrent, que ça soit des images interactives ou que ça soit une infographie où je peux positionner des choses, et on revient encore à cette pédagogie active que rend possible le numérique.

D'abord, ils ont toujours accès à ce parcours, et ils peuvent donc choisir à quel rythme ils vont en fonction de leurs possibilités.

J'utilise aussi beaucoup La Digitale, qui offre de nombreuses possibilités, de la roue de la fortune pour décider quel élève va passer à l'oral jusqu'à faire un mur collaboratif.

Donc, tout ça, mais toujours en restant très attentive à ce que ce soit adapté aux élèves en premier.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Je rejoins également ce que tu dis et c'est vrai que quand on arrive, il y a tous ces outils, il y a vraiment énormément d'outils, et je mettrais même un point d'attention, enfin, en tout cas, un conseil : je pense qu'on a parfois intérêt à rester près des outils qu'on a sous la main, notamment l'environnement numérique de travail.

Bien sûr, les environnements numériques de travail sont différents d'un endroit à un autre, parfois, il y en a qui offrent plus de possibilités que d'autres.

On peut retrouver également des outils, des fonctionnalités dans le Gestionnaire d'Accès aux Ressources.

En fait, ces deux choses-là ont en tout cas l'avantage de sécuriser un maximum les données des élèves, et ça devient intéressant.

Par exemple, dans mon ENT, on a la possibilité de créer des forums, on appelle ça des espaces collaboratifs.

Les élèves peuvent discuter, liker, il y a ce côté un petit peu, en plus, réseau social.

On peut également ajouter des contenus interactifs H5P.

Le H5P, c'est des vidéos à quiz, des textes à trous, des dictées, tout ça, on peut le mettre dans l'ENT, et on peut avoir accès en plus au suivi des élèves.

Donc, c'est vraiment très pratique.

Et je voulais quand même mettre en lumière le portail apps.education.fr.

Donc, c'est une plateforme qui propose pas mal d'outils.

Moi, j'en ai retenu trois qui me sont utiles autant en tant qu'enseignant que dans mon collectif Team Ludens.

On a donc Nuage, par exemple, qui est un cloud académique.

On a 100 Gigas de stockage dessus, on va pouvoir mettre nos séquences, on va pouvoir mettre des documents, créer des dossiers de dépôt, les élèves vont pouvoir déposer des choses sur ce dossier.

On a également Evento.

Evento, c'est une plateforme qui permet de créer des sondages très poussés.

On peut faire des sondages à partir d'un évènement, à partir de dates.

On va pouvoir recueillir ensuite les e-mails des participants.

Tous ceux qui disent oui à ce sondage, on va pouvoir envoyer un e-mail à tous ces participants qui ont dit oui.

Moi, je trouve ça très pratique, en tout cas, plutôt côté collectif associatif qu'enseignant.

Et enfin, Filesender, qu'on retrouve aussi sur la plateforme et qui permet d'envoyer des fichiers volumineux.

Ça peut remplacer d'autres outils qu'on trouve et qui sont externes.

Pour le coup, c'est quelque chose d'éducatif vraiment fait pour les agents de l'État.

Voilà, je voulais juste parler au moins de ces deux outils-là.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Et vous, Didier Roy, avant d'être chercheur, vous avez été enseignant en mathématiques dans le secondaire.

Est-ce que vous avez aussi des outils numériques à nous recommander ?

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Moi, j'ai une affection particulière pour deux outils bien différents.

Le premier, c'est plutôt une famille d'outils, ce sont les logiciels de géométrie dynamique.

C'est difficile à voir, la géométrie, pour les élèves, en particulier la géométrie dans l'espace, tout ce qui est 3D.

Les logiciels de géométrie dynamique permettent de faire des choses qu'il est difficile de faire pour un prof, par exemple montrer des figures construites pas à pas et créer aussi des situations didactiques très intéressantes où les élèves peuvent travailler, interagir entre eux.

C'est vraiment un outil que j'aime beaucoup, ce type de logiciels de géométrie dynamique.

Et le deuxième, c'est le robot dans un usage pédagogique.

En fait, c'est assez incroyable tout ce qu'on peut faire pour enseigner, avec un robot.

Alors, pourquoi ?

Déjà, le robot porte en lui-même un micro monde d'apprentissages à la frontière du monde physique et du monde numérique.

Et il fournit aussi des rétroactions aux utilisateurs.

Il fournit des rétroactions qui vont leur permettre d'avancer en toute autonomie.

Par exemple, quand on programme un robot, si on s'attend à ce qu'il fasse quelque chose, s'il ne le fait pas, il n'y a pas besoin que quelqu'un le dise, on le constate, donc on peut avancer, on peut corriger, etc.

C'est ce que je veux dire quand je parle des rétroactions.

En plus, c'est un objet tangible qui est à la fois motivant et rassurant.

Un certain nombre d'études montrent que, par exemple, c'est une aide très appréciée pour les élèves en difficulté.

Ils se retrouvent dans un nouveau paradigme qui leur permet d'exprimer des choses qu'ils n'expriment pas forcément par ailleurs.

Il ne faudrait pas croire, d'ailleurs, que le robot est réservé aux sciences.

Pas du tout.

On peut l'utiliser dans absolument toutes les disciplines.

Par exemple, en langues, il y a des robots, je pense en particulier à Thymio que j'ai vu faire des choses de ce type.

On l'utilise pour raconter une histoire, pour être soit le narrateur, soit un des personnages.

J'ai vu aussi, c'était toujours un Thymio, en géographie, pour suivre des lignes particulières qui représentent par exemple un fleuve, etc.

Ce sont des outils que j'aime beaucoup.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Nous allons maintenant passer aux pratiques.

Vous allez présenter une pratique pédagogique que vous avez pu mettre en place.

Charlie Rollo, vous utilisez beaucoup le numérique pour développer d'autres compétences, et notamment l'autonomie.

En quoi le numérique facilite-t-il le développement de l'autonomie des élèves, et quelles pratiques avez-vous mises en œuvre en classe ?

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-C'est vrai que la question de l'autonomie, ça fait longtemps qu'elle traverse ma pédagogie.

C'est une question que je me pose souvent.

Ça rejoint l'idée d'engagement et l'envie qu'ils s'approprient les usages du numérique, parce qu'on sait très bien que dans le futur, ils vont utiliser des outils, ils vont utiliser des choses qui ne sont pas forcément juste un crayon, un papier et on écrit.

Il y a ce côté-là qu'il faut développer.

Par exemple, cette année, j'ai beaucoup réfléchi à l'évaluation, à la question de l'évaluation et à rendre les élèves autonomes, notamment grâce aux sciences cognitives.

Donc, j'utilise ce qu'on utilise aussi à l'école élémentaire, ça s'appelle les leçons à manipuler.

Par exemple, les élèves ont une feuille avec des volets.

Ils soulèvent les volets pour avoir la réponse.

Donc, l'élève voit le vocabulaire ou voit des illustrations et peut se questionner lui-même, tout comme les fiches de mémorisation active.

C'est un outil qui est hyper intéressant pour l'évaluation, parce qu'on va la remplir dans le temps.

En fait, si vous voulez imaginer cette feuille, à gauche, on retrouve des éléments essentiels au cœur de la séquence, des choses qui vont revenir à l'évaluation.

Au milieu, les réponses travaillées avec les élèves, c'est des choses qui vont aller dans le temps.

La première semaine, on va beaucoup travailler sur la première partie de la feuille, puis on va avancer.

Et puis à droite, pareil, j'ai mis des volets qu'ils peuvent soulever pour se questionner eux-mêmes.

Donc, là, intervient aussi le numérique.

Par exemple, je pense aux cartes mémo, qu'on appelle aussi flash cards.

Si vous connaissez Digiflashcards de La Digitale, qui est vraiment bien fait, c'est des cartes recto verso.

Sur un côté, on a par exemple un mot en anglais, et derrière, en français.

On peut avoir des dates, on peut se questionner sur le culturel.

Ce qui est vraiment sympa avec cet outil, c'est que quand on met plus de six questions, on peut transformer les cartes mémo en QCM ou en textes à trous, il faut taper la réponse.

Et je voulais parler aussi d'Anki.

C'est un créateur de cartes mémo qui est basé sur la courbe de l'oubli d'Ebbinghaus.

Si on a bon, la carte reviendra plus tard.

Le but, c'est de réactiver sans cesse ses connaissances.

Et si on a faux, ça reviendra assez rapidement dans le temps.

Et pour aller encore plus loin, je mets en place la classe autonome, qui fait partie de la grande famille de la classe inversée.

Je vous conseille d'ailleurs d'aller sur le site d'Alan Coughlin qui est professeur d'anglais et interlocuteur académique au numérique, qui a un site qui s'appelle letlearn.eu.

En fait, la classe autonome, moi, je le fais pendant quelques heures.

Les élèves sont en autonomie.

Ils ont une feuille de route et ils avancent au gré de leur rythme, ils vont à leur rythme.

Je leur propose des activités variées, différenciées, et ils sont vraiment en autonomie.

Le but, c'est : "Vous avez trois heures, voilà ce que vous devez faire."

Ils vont à leur rythme, il y a parfois des activités bonus qui sont proposées.

Voilà ce que j'ai essayé de mettre en place.

J'ai rajouté des choses comme Learning Apps, que vous connaissez probablement, ou H5P, j'en parlais, qui permettent de créer des contenus interactifs.

Voilà, cette idée d'évaluation et de pratiquer vraiment chaque semaine ce que l'on peut faire.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Merci.

Nous allons passer maintenant à une autre pratique, celle de la classe inversée.

Cette pratique s'est développée aux États-Unis en 2007 lorsque deux professeurs ont voulu lutter contre l'absentéisme de leurs élèves en produisant leurs cours magistraux sous forme de vidéos.

Marie-Anne Dupuis, vous êtes une adepte de cette pratique.

Est-ce que vous pouvez nous aider à la définir et nous préciser comment vous la mettez en œuvre en classe ?

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Alors, je ne vais pas vous la définir de façon universitaire ou académique, je vais vous dire ce que moi, j'ai pensé au début.

J'ai regardé plusieurs conférences de Marcel Lebrun, qui est fantastique à écouter, parce qu'il explique très bien qu'il n'y a pas qu'une seule sorte de classe inversée, mais qu'il y en a plusieurs.

Peut-être que certains de mes collègues font de la classe inversée sans le savoir.

Pour moi, c'était faire travailler un peu les élèves en amont.

Je rejoins mon collègue Charlie, vraiment, qu'ils aient de l'autonomie, qu'ils se mettent acteurs de ce qu'ils doivent apprendre et de là où ils doivent aller dans leur formation.

Donc, ça, c'était l'interrogation, est-ce que ça allait fonctionner ?

Ils devaient travailler chez eux.

Un élève très gentil m'a dit : "Madame, si vous faites des capsules pédagogiques, je les regarderai dans le bus en rentrant."

J'enseigne l'économie-droit à des bac pro tertiaire, donc quand ils arrivent en seconde, c'est quelque chose qui ne leur parle pas.

Qu'est-ce que l'économie, le droit ?

Donc, j'avais créé en seconde une carte au trésor avec effectivement le programme de l'année entière, avec des capsules, des quiz et des missions à réaliser, avec un plan de travail que j'ai fait au début.

Après, ils n'en avaient plus besoin, ils savaient comment ça fonctionnait.

C'est ça qui m'a permis de vraiment inverser les rôles.

Je n'étais plus seulement devant la classe à leur dire des choses qu'ils devaient noter.

C'était eux qui étaient acteurs de ce qu'ils avaient à faire, en respectant certaines choses, bien sûr, mais c'est quand même eux qui décidaient de ce qu'ils devaient faire.

Il y avait plusieurs missions, donc c'est eux qui choisissaient.

Ça a été...

C'était un grand bouleversement, ce n'était pas du tout comme ça que je faisais.

L'année d'après, j'ai dû trouver autre chose.

On a fait une création d'entreprise, toujours avec ce même système d'avoir vraiment un parcours.

J'ai été vraiment agréablement surprise, parce qu'ils se sont pris en main, ils ont fait ce qu'ils avaient besoin de faire pour réussir et ça a été vraiment très, très sympathique de voir que ça leur plaisait et qu'ils accrochaient.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Merci beaucoup.

Je vous propose maintenant une immersion en classe, à la découverte d'une autre pratique, la classe flexible.

Une enseignante nous explique ce qui l'a poussée vers cette pratique et en quoi le numérique l'aide tous les jours en classe.

Enseignante.

-La classe flexible, c'est un système dans lequel les enfants ont le droit d'être mobiles en classe pour essayer d'optimiser les apprentissages.

Dans notre classe, on a du mobilier mobile, des tables à roulettes, des chaises qu'on peut déplacer facilement.

À titre personnel, j'avais déjà acheté des tabourets, des ballons, des galettes avec des picots dessus pour que les enfants puissent avoir une sensation de mouvement qui est atténuée aux yeux des autres.

Ce qui m'a amenée à la classe flexible, c'est mon fils, en fait.

J'ai un garçon qui suit très bien à l'école, mais qui ne se satisfait pas de ce qu'on lui propose en classe.

Il aime bien changer d'activité quand il a fini, il a compris l'exercice, il n'a pas besoin d'en faire dix.

Et moi aussi, parce qu'il se trouve qu'à la maison, j'ai un bureau, mais je préfère travailler sur mon canapé.

Je suis plus confortable.

Ça paraît bête, mais si à moi, ça me procure davantage de confort d'être sur mon canapé, pourquoi j'obligerais les enfants à rester six heures sur leur chaise ?

À la classe flexible, j'ai souhaité ajouter un plan de travail, parce que depuis plusieurs années, je trouve que c'est compliqué de gérer les différences entre les enfants, que ce soit en termes d'apprentissages ou de comportement en classe.

Donc, il fallait que je trouve un système qui me permette à moi d'être présente pour chacun d'eux et qui leur permette aussi d'acquérir une certaine autonomie, dont ils ont forcément besoin pour les années à venir.

Le plan de travail, c'est ce qui m'a semblé le plus efficace en termes de gestion du groupe tout entier, mais aussi de l'individu.

La place du numérique dans ma classe est très, très importante, car on a été dotés de tablettes, une flotte de 30 tablettes.

On a eu en plus, tous, des VPI.

Ça prend tout son sens dans la classe flexible et dans le plan de travail, parce que ça permet de dispatcher les enfants sur des activités variées.

C'est une manière de se familiariser avec les tablettes.

On va commencer aujourd'hui le rallye lecture, donc des livres soit à lire en version papier qu'on aurait à l'école, soit à lire sur tablette.

C'est aussi une manière de se familiariser avec les tablettes, parce qu'à la maison, ils en ont quasiment tous, mais pour un usage uniquement ludique.

Là, c'est bien d'apprendre aussi les règles de sécurité, mon mot de passe, je ne le dis à personne, je me déconnecte quand je quitte un site.

Ils ont des petits porte-clés avec chacun, pour chaque site où la classe est inscrite, leurs identifiant et mot de passe, avec pour consigne de ne le dévoiler à personne.

Donc, même si c'est en accès plutôt libre, personne, pour l'instant, n'a essayé d'avoir les mots des autres.

Et en termes d'apprentissages, je trouve que c'est vraiment un plus, parce qu'il y a beaucoup d'enfants, dans cette classe, qui ont du mal à rester sur leur cahier, même le geste graphique est difficile pour eux.

Je les soulage de ça avec la tablette.

Il y a deux ou trois enfants dans la classe pour qui c'est vraiment un plus énorme.

Jamais je ne reviendrai en arrière, non.

Je pense que le bien-être à l'école, ça va être, dans les années à venir, la fonction déterminante de la réussite des enfants.

Je me dis que cette liberté que je leur offre dans la classe, ça peut leur procurer l'impression, et c'est vrai, en plus, que si je rate, ce n'est pas grave, je peux recommencer la fois d'après.

Et c'est ça, l'objectif, de les mettre dans les meilleures conditions possibles pour que toutes les compétences soient acquises.

Je me dis que ce sera une petite parenthèse qui leur fera du bien, j'espère.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Quelqu'un souhaite réagir par rapport aux transformations concernant les modes d'apprentissage induites par la classe flexible ?

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Moi, ça me parle beaucoup, ce que cette enseignante fait en classe.

Il y a beaucoup de choses.

Je parlais tout à l'heure de ma quête vers l'autonomie et vers ce côté un peu horizontal des apprentissages, et là, c'est hyper intéressant, parce qu'on a une enseignante qui a créé dans sa classe...

Là, elle utilise le concept des classes flexibles.

Pendant qu'elle est au tableau en train d'expliquer des choses avec des élèves, d'autres sont en petits groupes en train de suivre leur plan de travail.

On a pas mal parlé des plans de travail, le plan de travail, c'est quoi ?

C'est une feuille sur laquelle l'élève va, en fait...

On parlait d'individualisation, ça rejoint un petit peu ça, l'élève va voir où il se trouve dans ses apprentissages, où il va pouvoir trouver les différents éléments.

Il va aussi pouvoir trouver les compétences qu'il va développer dans cette séquence ou dans les différents points qu'il a à aborder sur cette heure-là.

Ensuite, on va peut-être retrouver parfois "Je suis prêt à être évalué".

Il y a ce côté d'autonomie, "je suis prêt à être évalué".

Ensuite, ce qui est intéressant, elle le montre bien, la classe flexible, on voit bien qu'elle n'a pas non plus plein de choses, plein de mobilier, par exemple des chaises à roulettes, etc., on a vraiment un décor un peu classique, mais elle a repensé les espaces, et ce qui est flexible, c'est la manière dont elle approche sa pédagogie.

Donc, les élèves, là, sont en autonomie et c'est vraiment appréciable à voir.

Moi, en tout cas, je trouve ça très intéressant.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Très bien.

Et est-ce que vous pouvez analyser le rôle du numérique dans cette pratique de la classe flexible ?

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Déjà, par exemple, ce que je trouve intéressant, c'est qu'ici, le numérique va créer une espèce de bulle d'apprentissage où chacun fait des choses dans son coin.

Par exemple, elle est au tableau interactif avec cinq ou six élèves pour expliquer un point très particulier, il y a un moment où on voit des élèves en train de suivre leur plan de travail, sur numérique, pour le coup, et il y en a d'autres qui sont sur leur tablette.

C'est vraiment cette petite bulle, chacun suit son petit parcours.

En plus, il y a aussi cette idée de différenciation et d'adaptation, puisqu'il y a des élèves qui ont besoin de la tablette, justement, pour les aider, parce qu'ils ont des troubles graphiques, par exemple.

Donc, là, c'est vraiment l'idée que je soutenais tout à l'heure du numérique comme levier.

Il n'est pas là en premier, mais il aide beaucoup et il soulage.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Alors, la recherche a parfois modéré l'enthousiasme concernant les effets positifs du numérique sur la réussite des élèves et a même parfois identifié des points de vigilance.

Avez-vous repéré des erreurs concernant l'utilisation du numérique en classe, des erreurs à ne pas commettre ?

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Alors, effectivement, la recherche a pointé que le numérique était une réelle aide, était efficace pour aider à enseigner à tous les élèves.

C'est vrai qu'ensuite, il y a quelques précautions à prendre, justement, pour éviter les erreurs que vous citez, notamment se demander s'il n'existe pas quelque part des ressources, des échanges qui ont déjà été traités par des collègues dans l'usage qu'on imagine, pour éviter de commettre des erreurs en faisant ce type de démarche.

On peut se lancer dans des choses trop compliquées à créer, à mener en classe.

Ça aussi, ça peut avoir un effet décourageant, donc je pense qu'il faut rester modeste, faire des choses assez simples, surtout pour les débutants, pour être sûr de bien maîtriser tout ce qu'on est en train de faire, et il faut aussi disposer des bons outils.

On l'a dit plusieurs fois, puisqu'on a pointé, même, des outils, il faut disposer des bons outils matériels et logiciels pour se lancer.

D'ailleurs, pour ça, le soutien des institutions pour accompagner les enseignants est très important, pour qu'ils puissent avoir une bonne expérience de l'usage du numérique.

C'est comme si on partait en montagne sans avoir la bonne carte, le bon équipement.

Il est très possible qu'on fasse demi-tour avant d'avoir atteint l'objectif.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Moi, je partage ce que dit Didier, et d'autant plus que je pense qu'il ne faut pas se dire : "Il faut absolument que je fasse du numérique."

Il ne faut pas faire du numérique pour faire du numérique.

Certains d'entre nous, moi y compris, je l'utilise parce que j'aime ça, mais quelquefois, je me demande si je vais maîtriser ou non.

Donc, là, il faut s'appuyer sur des gens qui vont pouvoir vous aider et vraiment se dire aussi : "Est-ce que ça fonctionne avec mes élèves ?"

J'ai le souvenir de cette petite élève qui m'avait dit une fois : "J'aurais bien écrit sur mon cahier, mais vous n'allez pas être contente."

Là, ça m'a vraiment ouvert les yeux et je me suis dit qu'il fallait que je leur laisse le choix.

Ce que disait Charlie est totalement vrai.

C'est aussi ça, le numérique.

Ça permet de diversifier ce qu'on leur propose et ça leur permet de trouver ce qui fonctionne vraiment pour eux.

Alors, après, il y a aussi cette idée, moi, le mot qu'on me dit en premier sur le numérique, c'est "chronophage".

Quand j'avais parlé de ma carte au trésor où j'avais créé toutes mes leçons pour toute l'année, on m'avait dit : "Tu as dû y passer..."

Certes, je conçois que quand on utilise un outil pour la première fois, il y a un petit côté chronophage le temps qu'on apprenne à le maîtriser.

Mais après, quand c'est un outil que l'on aime, je ne suis peut-être pas objective, parce que j'adore ça, je ne vois pas le temps passer, mais quand on commence à maîtriser, on sait ce qu'on a à faire, et donc ça va très vite et ça ne prend pas plus de temps que de créer une leçon comme je créais il y a 15 ans, papier, avec des recherches.

Donc, il ne faut surtout pas hésiter à se lancer, et ne pas se mettre trop de barrières, parce que plein de personnes peuvent vous aider, y compris des collègues avec qui vous pouvez échanger.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-J'arrive en dernier, donc ça va être un peu redondant.

J'adore tenir des veilles.

J'en tiens sur plein de choses.

Je fais de la veille sur les sciences cognitives, sur l'autonomie, sur l'enseignement en général, sur la formation.

Au début, je faisais une veille sur les outils, et il y a des outils chaque semaine, en fait.

Il y a des outils géniaux, esthétiques qui arrivent tout le temps.

Et l'erreur que moi, j'ai pu faire, c'est que j'adorais les utiliser avec les élèves.

J'en utilisais plein, puis je suis devenu référent numérique dans mon établissement, car mon chef d'établissement en cherchait un, et j'ai eu des formations par la DANE, la Délégation Académique au Numérique Éducatif.

Ça m'a permis, en fait, de prendre le recul sur ma pratique et de réfléchir à la plus-value du numérique et à la pertinence des outils que j'utilisais.

C'est ce que je disais, c'est un peu répétitif, mais je conseille aussi de lire un livre qui s'appelle "Apprendre avec le numérique, mythes et réalités" par Franck Amadieu et André Tricot, dans lequel on a cette citation qui est : "La question est bien de savoir quelle tâche soutenant quel apprentissage peut être réalisée avec l'outil."

Il y a cette idée de contre-productivité.

Parfois, l'outil, c'est un trop-plein.

En fait, on a des nouveaux apprentissages et également un nouvel outil.

Pour l'élève, ça fait une surcharge cognitive et il faut faire attention à ça.

Je pense que c'est une erreur de lier les deux, c'est-à-dire : "Je vais vous apporter quelque chose de nouveau au niveau des connaissances, et vous demander quelque chose de nouveau en termes de gestes techniques."

Marie-Anne l'a très bien dit aussi, il y a cette idée de rentabilisation de l'outil.

Il ne faut pas l'utiliser qu'une fois.

Une fois qu'on a utilisé la web tv, la web radio, la tablette, un outil, quelque chose, n'importe quoi, c'est bien de le réutiliser, parce que c'est là qu'on va développer des automatismes et où ils vont pouvoir réutiliser des outils par le futur.

Une erreur, aussi, ce serait de rester dans son coin.

Il faut absolument aller voir les collègues, voir comment ils font.

C'est important de pouvoir se comparer à ce que font d'autres collègues qui sont plus à l'aise avec l'outil.

Enfin, mais je l'ai déjà dit avant, essayer peut-être au maximum de rester sur cinq ou six outils et de parfois rester sur, peut-être, l'ENT et d'autres outils qui seraient OK à être utilisés.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Didier Roy, l'intelligence artificielle est un champ de la recherche très actif, plein de promesses.

Est-ce que vous avez aussi identifié des erreurs, des risques, lorsqu'on utilise l'intelligence artificielle au service de l'éducation ?

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Sans doute, le premier risque, le premier écueil, c'est de considérer que l'IA va être la réponse à tous les problèmes de l'éducation.

Ça, c'est quelque chose qu'on peut pointer, c'est un risque qui existe.

D'ailleurs, on retrouve les mêmes éléments que pour le numérique en général.

Comme ça a été dit plusieurs fois, c'est n'utiliser l'IA que quand ça apporte réellement quelque chose, quand il y a un besoin de personnaliser ou d'autre chose, mais que ça apporte réellement quelque chose.

Deuxièmement, moi, je trouve important aussi de n'utiliser que des outils qui ont été validés.

Si on utilise un dispositif qui a de l'IA, c'est important qu'il ait été validé par la recherche, c'est-à-dire qu'on sait que son usage va avoir un intérêt.

Ensuite, un autre écueil, ce serait de considérer que ce n'est pas forcément la peine d'initier les enseignants aux bases de l'IA, à ses possibilités, et aussi à ses limites.

Je pense qu'au contraire, c'est très important que tous les enseignants soient formés aux bases, on ne parle pas d'en faire des spécialistes, de manière à ce qu'ils puissent bien percevoir les possibilités, les limites, donc, et puis qu'ils puissent adhérer à l'usage de l'outil qui va intégrer de l'IA.

Et le dernier point, ce serait de vouloir aussi réduire les interventions humaines parce qu'on a de l'IA qui fonctionne bien.

La tentation peut être de se dire, je citais des exemples tout à l'heure, "Finalement, on a des outils qui personnalisent pas mal, après tout, le prof n'a peut-être pas besoin d'être toujours là."

Donc, là, il faut être prudent, parce que les interactions humaines entre élèves et professeurs sont déterminantes pour aider les élèves à progresser, pour qu'ils gagnent en confiance, pour leur faire comprendre le monde, si je peux dire ça comme ça.

Donc, il faut être attentif à ce qu'on fait avec l'IA.

Il ne faut pas considérer qu'il faut qu'il y en ait partout.

Ce n'est pas capable de remplacer un enseignant.

Enseigner est beaucoup plus complexe, beaucoup plus subtil que ça.

Mais l'IA est très précieuse pour aider l'enseignant à différencier sa pédagogie, mais il faut savoir ce qu'on fait avec.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Merci beaucoup.

Nous allons clôturer notre réflexion en abordant la question des conditions nécessaires à une utilisation efficace du numérique.

Je vous propose que chacun nous donne sa vision de ce qui peut être fait à l'échelle individuelle pour que nous allions dans la direction d'un plus pour les élèves.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-La première chose, et ça peut paraître évident, mais je pense que c'est être à l'aise, être à l'aise avec l'outil qu'on va utiliser.

La semaine dernière, j'étais encore en formation, c'était sur les tablettes.

Il y a ce côté où on se dit : "Je ne le fais pas avec les élèves, parce que je ne connais pas l'outil."

C'est cette crainte qui empêche parfois certains enseignants de se lancer.

On a intérêt parfois à juste prendre l'outil en main, prendre le temps de travailler avec et pourquoi pas de parler avec d'autres collègues pour monter en compétences sur l'outil qui est concerné.

Je pense que c'est la première chose.

Je dirais anticiper, ça, c'est vraiment une question importante, parce que parfois, le wi-fi ne fonctionne plus, un site peut être mis à jour, il y a plein de raisons pour lesquelles une séance avec du numérique peut ne pas fonctionner.

C'est vraiment très important d'anticiper, d'avoir un plan B.

Je dirais aussi, quand on utilise un outil avec les élèves, ne pas hésiter à leur préparer des petits tutoriels ou à en trouver, il y en a qui existent, pour les accompagner dans cette tâche, parce qu'eux, ils vont aller vite, ils vont taper un peu partout, ils vont regarder comment ça fonctionne là où on est un peu plus réticents.

Ils vont taper partout pour voir comment ça fonctionne.

Ils vont comprendre.

Pourquoi pas monter un petit groupe d'experts autour de l'outil, et après, eux vont pouvoir aider leurs camarades à monter en compétences sur l'outil.

Quelque chose qui me tient à cœur, c'est de se tourner vers les organisations qui existent.

Il y a Canopé, la Délégation Académique au Numérique Éducatif, appelée DANE, et puis de se tourner aussi vers les collectifs enseignants.

Là, je prêche un peu pour ma paroisse, mais les collectifs enseignants, il y en a plein.

Il y a toute une constellation d'enseignants qui se mobilisent pour accompagner les enseignants, qui se mobilisent pour mutualiser.

Il y en a qui ont des sites internet, qui proposent des ateliers en ligne.

Je pense qu'on a tout intérêt à travailler ensemble et à apprendre ensemble, et ça peut commencer par ces collectifs-là.

Et si j'avais un souhait, ce serait justement que l'institution travaille davantage avec les collectifs.

On a là encore tout intérêt à travailler ensemble, main dans la main, parce qu'on va vers un objectif commun qui est le bien-être des élèves, mais aussi leur montée en connaissances, en compétences à travers ce qu'on peut leur proposer, et puis faire travailler l'intelligence collective.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Je vais rejoindre ce que dit très bien mon collègue.

C'est-à-dire que quand j'ai débuté dans le numérique, vraiment, c'est Canopé qui m'a prêté une mallette de tablettes, et une des personnes de Canopé est venue m'aider à mettre ça en place, parce que ce n'est pas toujours évident.

Je pense, il y a plein de gens, je ne soupçonnais pas qu'autant de personnes pouvaient nous aider, que ce soit la DANE, la CARDIE ou même certains collègues.

Et quand on participe à des forums ou qu'on va sur les réseaux sociaux, on peut échanger.

Et puis je voudrais rajouter qu'il faut avoir confiance en nos élèves, parce que l'année dernière, par exemple, j'avais un élève qui avait appris avec son prof de technologie, et je salue les profs de technologie, à faire des Learning Apps, et il m'a fait quantité de quiz sur Learning Apps pour le bac, donc on a révisé le bac avec ce qu'il avait fait, mais c'était vraiment extraordinaire.

Pour conclure, moi, je dirais qu'il ne faut surtout pas que les collègues qui nous regardent se disent : "Je ne fais pas de numérique, ce n'est pas bien."

Ça viendra petit à petit.

Ce n'est pas parce qu'on fait du numérique que c'est mieux, j'ai des collègues qui n'en font pas du tout, mais leurs élèves adhèrent totalement à leur façon de faire.

Il faut essayer de l'intégrer un peu.

J'ai beaucoup aimé ce qu'a dit Charlie tout à l'heure.

Nos élèves ne travailleront pas qu'avec une feuille et un crayon.

Je forme des élèves pour aller en entreprise, et le numérique est de plus en plus présent.

C'est hyper important qu'en sortant avec leur bac professionnel, ils puissent savoir de quoi on parle et même proposer...

J'adore quand mes élèves reviennent de stage et disent : "Je leur ai montré cet outil, ils ne connaissaient pas."

Donc, voilà, moi, j'ai vraiment un espoir.

Il faut le faire intelligemment, il ne faut pas en faire tout le temps, mais il faut l'utiliser, il faut se lancer.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Merci.

Et vous, Didier Roy, est-ce qu'il y a des recommandations formulées par la recherche ?

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Alors, je vais vous citer quelques recommandations qui vont compléter ce que viennent de dire Marie-Anne et Charlie.

Ces recommandations sont issues du livre blanc Inria "Éducation numérique" que nous avons sorti en fin 2021, début 2022.

La première des recommandations que j'ai envie de citer, c'est de développer les projets de recherche qui soient tournés vers la réussite scolaire, spécifiquement tournés vers la réussite scolaire, dans des partenariats académiques ou économiques.

Ensuite, développer aussi des méthodologies d'évaluation qui soient interdisciplinaires, rigoureuses, pour évaluer sérieusement les effets du numérique de tel ou tel dispositif.

Donc, avoir quelque chose qui permette d'éclairer les usages et les choix qui sont faits par les uns ou les autres.

Ensuite, passer à l'échelle en termes de formation des enseignants au numérique, dans le prolongement de ce qui a été évoqué précédemment, de ce qui se fait déjà en termes de formation.

Donc, passer à l'échelle pour être sûr que tout le monde dispose des bases pour avancer.

Ensuite, développer des ressources éducatives numériques comme étant des biens communs, donc qui soient à la fois libres et évolutives, et qu'elles soient correctement indexées, là aussi, c'est une demande forte, une préconisation très forte, qu'elles soient correctement indexées pour que les enseignants s'y retrouvent.

D'ailleurs, on notera que ce partage des ressources, cette mutualisation...

On a parlé beaucoup de partage, de mutualisation, de coopération, évoqués déjà dans les communautés citées par Charlie tout à l'heure, ça, c'est vraiment très intéressant, et ça s'inscrit dans la dynamique mondiale des ressources éducatives libres qui est portée par l'ONU, l'UNESCO, la Francophonie, et qui préconise justement d'utiliser ce type de ressources.

Ce qui m'amène à ma conclusion qui va dans le prolongement et qui va reprendre un objectif de l'ONU.

On a parlé aujourd'hui de différenciation pédagogique, on a parlé d'outils numériques pour améliorer les apprentissages et tendre vers la réussite de tous les élèves, on a parlé de recherche en IA pour l'éducation.

Finalement, tout ça, ce sont des moyens, ça concourt à atteindre l'objectif, je le cite exactement, l'objectif numéro quatre du plan de développement durable de l'ONU qui nous dit, je ne le connais pas par cœur, je vais le citer, "Assurer l'accès à tous à une éducation de qualité sur un pied d'égalité et promouvoir les possibilités d'apprentissage tout au long de la vie."

Par les temps qui courent, c'est plutôt un beau programme.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-En effet.

Merci beaucoup.

Nous allons maintenant pouvoir passer au tchat.

Nous allons répondre aux questions.

Alors, nous avons une première question.

"Les outils comme Genially sont-ils conformes au RGPD, c'est-à-dire au règlement général sur la protection des données ?"

Donc, une question sur Genially, qui a envie de répondre ?

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Je ne sais pas si j'ai le droit de répondre.

Moi, j'utilise Genially, en l'occurrence, pour montrer mes parcours de formation, donc quand mes élèves l'utilisent, ils ne donnent pas leurs données.

Je sais que c'est un peu controversé sur l'histoire du RGPD.

Genially est en pourparlers pour que, justement, on puisse l'utiliser sans se poser cette question.

J'avoue que sans Genially, je n'arriverais plus à travailler comme je le faisais avant.

Voilà, si vous ne faites pas créer des comptes à vos élèves...

Après, j'avoue très humblement que mes élèves adorent l'outil, et que de ce fait, souvent, ils se créent des comptes.

Mais après, c'est leur choix à eux.

Mais au départ, je pense qu'on peut l'utiliser pour créer des parcours de formation.

Moi, ma carte au trésor, cette année, j'ai fait la rue du commerce, donc ils parcourent la rue du commerce et ils le font quand ils sont au lycée.

Donc, il n'y a pas d'adresses IP qui sont subtilisées pour faire autre chose derrière.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-D'accord, merci.

On a une deuxième question.

"Où trouver une liste exhaustive de tous les outils destinés à des classes de primaire ?"

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Ça rejoint ce dont je parlais tout à l'heure.

On voit la nécessité d'une indexation des ressources.

Quand je dis ressources, ça va être des activités, mais aussi des outils qui ont aussi été évalués pour pouvoir bien renseigner les enseignants.

Moi, je dirais qu'il doit déjà y avoir beaucoup de choses sur Éduscol.

Il doit y avoir beaucoup de choses, un certain nombre de conseils.

Après, il y a des forums dédiés aux enseignants du primaire où il y a des échanges entre les enseignants, parce que c'est vrai qu'avoir les retours du terrain, c'est quelque chose d'essentiel pour savoir si un outil, on va pouvoir l'utiliser ou pas.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Je rajouterais même qu'il faudrait une indexation d'outils, oui, mais une indexation des usages.

Parfois, on a des outils, on a toute une liste de ressources, on ne sait pas quoi en faire.

Ça peut être intéressant d'avoir une entrée usages.

Par exemple, j'aimerais créer des capsules audio, j'aimerais utiliser ça, qu'est-ce que je peux utiliser ?

Et là, ça devient plutôt intéressant, je pense.

Une entrée par usage, ça me paraît un peu plus pertinent que l'outil, parce que l'outil...

Bon, après, c'est un...

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-C'est moi qui n'ai pas été assez précis.

Ce que j'entends par indexation, c'est une indexation complète, de l'outil et aussi de ce qu'on peut en faire.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Moi, je crois que ce n'est pas trop ce qu'il faut...

Je pense que moi, là où j'ai réussi le mieux à me lancer, c'est en discutant avec des collègues, et ce qui est un peu dommage, c'est qu'en fait, on le fait de nous-mêmes, alors que peut-être...

J'ai été inspirée, toujours, par des collègues que j'ai trouvés soit sur un réseau social, ou des collègues dans un autre lycée.

Donc, ça, c'était le positif.

Et puis après, une liste, ça me paraît énorme.

C'est ce qu'on disait tout à l'heure...

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Il faut que ce soit bien indexé.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Et puis surtout, avec les outils, on ne sait pas vraiment, on ne peut pas dire qu'un outil est pour l'élémentaire, le collège ou le lycée.

Il y a des outils qui peuvent être utilisés à tous les niveaux.

Il me semble qu'il y a le Bar à Ressources de la DANE de Versailles, il y a beaucoup d'outils.

Quand on y arrive, il y a énormément de choses, on parlait de beaucoup de possibilités, il y a beaucoup d'outils.

Pour éviter de se noyer, le côté usages peut être intéressant.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Je rajoute aussi que j'ai une profonde admiration pour les professeurs des écoles.

Je ne dis pas ça pour leur faire plaisir.

Ils sont très inventifs.

Ils n'ont pas beaucoup de moyens, souvent.

Moi, je m'inspire beaucoup de ce qu'ils font.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-On s'inspire beaucoup d'eux.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-On s'inspire beaucoup d'eux.

Eux, ils rendent les élèves autonomes, il y a pas de problème.

C'est après que ça se gâche un peu.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Merci beaucoup pour cet hommage envers les professeurs des écoles, et on a bien compris qu'il n'existe pas une liste exhaustive des outils, parce que ça ne serait pas possible et que les communautés apprenantes entre collègues sont des espaces où vous pouvez découvrir beaucoup d'usages liés aux outils.

Alors, on a une autre question un peu sur les outils.

"Quels sont les outils de veille pertinents ?"

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Pour faire de la curation.

Moi, j'utilise beaucoup Pearltrees.

Pearltrees est un outil qui est dans mon ENT, il a été intégré.

C'est une ressource qui nous a été offerte par le Département.

Dans les lycées, on le retrouve aussi.

Là, je parle vraiment du 78, dans les Yvelines, c'est un outil qui a été donné.

C'est un outil que j'utilise beaucoup parce qu'il y a un petit webclip.

Dès qu'on est sur un site intéressant, on clique dessus, et on peut mettre une page dans nos favoris.

Mettre dans ses favoris, c'est aussi de la curation.

Il y a aussi ça, ça paraît bête, mais ça peut être pas mal.

Et pourquoi pas aussi ajouter sur un nuage, un cloud académique ou pas, pour mettre des liens de côté, des fichiers, etc.

Moi, j'utilise beaucoup Pearltrees, donc voilà.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Moi, j'ai Pearltrees aussi, mais je l'utilise moins que toi, peut-être.

Alors, je vais dire quelque chose, je ne sais pas si...

Le réseau social que j'utilise le plus, c'est Twitter.

C'est vraiment là-dessus qu'il y a...

En ce moment, c'est compliqué d'en parler, mais il y a beaucoup d'échanges entre profs.

De ce fait, on a un petit groupe d'échanges de profs d'économie-gestion.

Et puis il y a aussi, quand même, Viaeduc, je trouve qu'on n'en parle pas assez, parce que j'aime beaucoup.

Bon, c'est un peu controversé aussi, mais je retrouve beaucoup de choses.

Il y a beaucoup de profs qui n'apprécient pas forcément de l'utiliser, parce qu'il y a tellement de choses qu'on peut s'y perdre, mais en faisant des petits groupes...

Nous, en éco-gestion, on a le Cerpeg, qui est fantastique et où on retrouve pas mal de choses.

Il faut essayer de trouver quelque chose où on ne se perde pas, parce que c'est vrai qu'après, quand on commence à chercher, des collègues me disent : "Où tu as trouvé ça, encore ?", et souvent, c'est un collègue qui me l'a envoyé.

Si on est plusieurs à regarder, on repère ce dont on a besoin, et puis ça se passe comme ça.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Très bien, merci.

Nous avons une question sur la conduite de classe.

La voici : "Serait-il possible d'avoir un exemple de conduite de séance avec les outils numériques, c'est-à-dire avec, notés, l'organisation de la classe, le respect des règles, etc.

?"

Un exemple de conduite de séance.

Didier Roy, chercheur Inria et LEARN EPFL en technologies numériques pour l'éducation.

-Moi, j'en ai vu sur des sites d'enseignants, notamment de primaire.

J'ai vu sur des sites d'enseignants de primaire.

J'avais été surpris des développements complets de séances qui peuvent permettre à un autre enseignant de s'approprier des choses.

Charlie Rollo, professeur d'anglais, collectif Team Ludens.

-Il y a le site dont je parlais tout à l'heure, letlearn.eu, Alan Coughlin a justement fait une vidéo d'une séance et comment il mettait en place.

Bien sûr, c'est une séance, une fois.

Il faut aller voir les collègues.

Il y a souvent ça dans l'OPAF et également, dans certaines académies, il y a le CLISE, c'est les enseignants qui ouvrent leurs portes, et ça peut être intéressant pour certains enseignants pour voir comment ça fonctionne, car expliquer comment on met en place, ça peut prendre du temps.

Mais en tout cas, je pense qu'il faut commencer petit à petit, guider, il y a les questions de consignes, il y a la feuille de route, ce qu'on va mettre dedans, en fait, c'est très personnel, comme manière de faire.

Je pense qu'on fait tous différemment et on avance avec ce qu'on peut trouver, donc il y a une richesse.

Tu parlais de sites internet, il y en a beaucoup.

Je peux conseiller quelques lectures.

Sylvain Connac a écrit quelques livres sur le sujet, il y a des ressources qui existent.

En plus, on parlerait de notre pratique à nous, dans un contexte, je ne sais pas si ce serait pertinent.

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-C'est surtout que je pense qu'il ne faut pas croire que le numérique permet de formater, parce que moi, pour avoir tenté plusieurs choses, ça fonctionne avec une classe et pas avec l'autre.

Donc, il va falloir s'adapter en termes d'outils, en termes d'organisation.

Il y a des classes avec lesquelles le plan de travail va fonctionner, d'autres, ça ne marchera pas.

Par contre, c'est pareil, les capsules pédagogiques, quand j'ai commencé à faire des capsules pédagogiques, à m'enregistrer, même si je n'aime pas beaucoup entendre ma voix, quelqu'un de la DANE, à l'époque, m'avait dit : "Tu as raison de faire ça, parce que tes élèves retrouvent ta voix et que c'est important."

Donc, faire une capsule pédagogique, ça n'a rien d'évident, mais enregistrer son petit écran sur une petite chose sur laquelle ils pourront revenir...

C'est ce que j'aime, ils peuvent revenir sur ce qu'on a fait en cours et ils peuvent même, un truc encore mieux, montrer à leurs parents.

Je leur dis : "Moi, j'ai un blog, il y a le mur collaboratif, montrez à vos parents ce qu'on fait.

N'ayez pas peur de dire qu'en lycée professionnel, on travaille aussi beaucoup et on fait des choses très bien."

Mais jamais je ne fais la même chose avec une classe, par rapport à la question.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Merci.

On termine avec une dernière question.

"Vous parlez du geste graphique, je suis enseignant au lycée et je m'aperçois que des élèves fatiguent après avoir écrit trois phrases.

Avez-vous des retours sur ce phénomène du 'je fatigue à écrire avec un stylo' ?"

Marie-Anne Dupuis, professeure d'économie-gestion.

-Oui, mes élèves fatiguent beaucoup avec leur stylo.

C'est sûr et certain.

Mais ce n'est pas parce que je fais du numérique que je...

Ils ont quand même des épreuves au bac, et donc tous les ans, ils ont un petit cahier.

Par contre, quand ils fatiguent, l'ordi n'est pas loin, donc on peut varier les plaisirs, justement, pour éviter cette fatigue.

Et après, moi, cette année, justement, en co-intervention avec ma collègue de lettres, on a fait quelque chose sur la calligraphie.

Ça leur a fait redécouvrir ce plaisir d'écrire, car la plupart de mes élèves me disent : "J'écris mal, il ne faut pas que j'écrive, je fais trop de fautes."

Je suis surprise que maintenant, ils aient envie de faire quelque chose.

"Vous avez vu comme j'ai bien écrit ?"

Ça peut commencer par un truc simple, juste leur faire écrire un acrostiche...

Je ne suis pas prof de français, mais justement.

Malheureusement, les adultes sont pareils.

Au bout de trois lignes, on commence à fatiguer.

On écrit de moins en moins.

Moi, j'aime...

En ce moment, ils disent : "Regardez comme mon cahier est beau."

Donc, il y a ce plaisir qu'il faut qu'ils retrouvent.

Je pense que la fatigue vient de là.

Quand c'est joli, c'est quand même plus sympathique, quitte à mettre un peu de couleur, à mettre un sticker.

J'ai essayé de chercher des choses qui pouvaient donner un peu d'envie.

Ce n'est pas forcément du numérique, pour le coup.

Miléna Eskenazi, médiatrice au Réseau Canopé.

-Très bien.

Merci beaucoup.

Nous sommes arrivés au terme de ce webinaire consacré aux outils numériques pour repenser ses pratiques pédagogiques.

Merci à nos trois intervenants d'avoir partagé votre expérience, votre expertise.

Merci aux équipes de Réseau Canopé pour l'organisation et merci à vous qui avez suivi ce webinaire.

À bientôt pour de nouvelles formations autour du numérique.

Crédits

  • Direction de publication : Marie-Caroline Missir
  • Production : Réseau Canopé
  • Partenariat : Pix
  • Licence : CC BY-NC-ND 4.0

Ressource produite avec le soutien du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse

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